Paris le 30 janvier 2018
Jacques BIDALOU
Magistrat honoraire
à
Mmes et MM. les Hauts Conseillers de la Cour de Cassation
Deuxième Chambre Civile
OBJET : Pourvoi en cassation contre l’ordonnance du 30 novembre 2017 portant rejet d’une demande de renvoi pour cause de suspicion légitime.
Observations sur l’avis du 22 janvier 2018 émis par le Conseiller-Rapporteur
Ref. : a. 973 du CPC
Le décret de nomination ne donne au magistrat que le droit de se qualifier magistrat.
Il doit être procédé à son installation pour qu’il puisse exercer effectivement ses fonctions.
C’est pourquoi c’est comme garantie statutaire d’ordre constitutionnel que l’ordonnance statutaire du 22 décembre 1958 prescrit en son article 7 que « Les magistrats sont installés dans leurs fonctions en audience solennelle de la juridiction à laquelle ils sont nommés ».
C’est par un décret du 17 janvier 1978 que Jacques BIDALOU a été nommé juge chargé du service d’instance de Hayange.
Il a été installé dans ses fonctions à l’audience solennelle du TGI Thionville le 1er février 1978.
Par une décision du 8 février 1981,le Conseil supérieur de la Magistrature, siégeant en formation juridictionnelle, a prononcé la révocation de Jacques BIDALOU.
Cette décision n’était nullement assortie de l’exécution provisoire, et Jacques BIDALOU a formé devant le Conseil d’Etat un pourvoi en cassation contre cette décision du 8 février 1981.
Aux termes de la loi d’amnistie du 4 août 1981, et spécialement son article 16, « l’ exécution de la sanction est suspendue jusqu’à ce qu’il ait été statué sur la demande ».
C’est pourquoi lorsqu’en exécution de son décret de nomination du 5 janvier 1982—- « sur le poste vacant de Hayange », qui n’était nullement vacant !—- l’auditeur de justice Bernard WEIER est convoqué à l’audience solennelle d’installation du 21 janvier 1982 devant le TGI Thionville, Jacques BIDALOU est en droit de se porter partie intervenante à titre principal à cette audience, pour rappeler qu’il reste le titulaire en titre du tribunal d’instance de Hayange.
Jacques BIDALOU produit d’ailleurs à cette audience solennelle des conclusions signées de ses avocats parisiens Jacques VERGES et Isabelle COUTANT-PEYRE, qui rappellent que le TGI Thionville a sous le contrôle de la Cour de cassation l’obligation de « rechercher les causes d’incapacité légales », et de « vérifier la régularité et l’authenticité des actes produits devant elle » ( Encyclopédie Dalloz, Recueil Procédure et Juris-classeur-Répertoire pratique)… qui rappellent aussi que Jacques BIDALOU n’a jamais donné son consentement pour recevoir une affectation nouvelle, que le décret nommant M. WEIER est contraire à l’article 4 du Statut de la Magistrature et caractérise une voie de fait.
En tout état de cause, il faut le redire ici, la décision de révocation du 8 février 1981 n’est nullement assortie de l’exécution provisoire et reste soumise aux suites d’un pourvoi en cassation suspensif
C’ est donc à bon droit que Jacques BIDALOU a formé appel du jugement prononcé par le TGI Thionville à son audience solennelle d’installation du 21 janvier 1982 qui avant d’ordonner qu’il soit dressé procès-verbal de l’installation de M. WEIER, a rejeté sans motivation exprimée, les conclusions d’intervention de Jacques BIDALOU.
Ce jugement du 21 janvier 1982 a été rendu dans une période et un contexte très troublé, prononcé par un tribunal présidé par l’artisan passionné ( M. Jean LILTI) des poursuites disciplinaires diligentées contre Jacques BIDALOU, et tout pouvait laisser supposer et en tout cas espérer que dans le temps de la procédure d’appel, et le cours de la mise en état, l’affaire serait finalement examiné dans une sérénité retrouvée pour être tranchée dans le seul respect du droit applicable.
Malheureusement, les années ont pu passer, les temps sont demeurés très troublés, et c’est ainsi que Jacques BIDALOU devra attendre que la Cour d’appel de Versailles— compétente après la cour d’appel de Metz puis la cour d’appel de Paris—- fixe devant elle l’audience du 21 février 2008 pour entendre utilement la cause—- soit donc après un dépassement du délai raisonnable à hauteur de 26 années !
Et c’est un arrêt stupéfiant que va rendre le 7 février 2008 la Cour d’appel de Versailles car après avoir rappelé qu’en vertu de l’article 543 du CPP, la voie de l’appel est ouverte en toutes matières, et après avoir rappelé que comme le soutient justement l’appelant, le terme « jugement » doit s’entendre de toute décision juridictionnelle de première instance, de toute décision rendue par l’autorité judiciaire dans ses rapports avec le justiciable ou de tout acte du juge par lequel il tranche le litige qui lui est soumis, la Cour va juger que « la décision déférée, bien qu’elle mentionne l’intervention de Jacques BIDALOU à l’audience pour s’opposer à l’installation de Bernard WEIER, les réquisitions du procureur de la République et le délibéré des membres du tribunal, est un acte d’administration judiciaire ! Sic !
Et la Cour d’appel de Versailles va insister pour affirmer que « l’installation des magistrats est une mesure d’administration judiciaire destinée à assurer le bon fonctionnement du service public de la justice …une telle mesure ne peut être qualifiée de jugement, elle est alors insusceptible d’appel ». Sic !
Ainsi donc, voilà une garantie statutaire, destinée comme telle à assurer l’indépendance de la justice et des juges, et inscrite en conséquence par le Législateur organique dans le Statut de la Magistrature justement prévu par l’article 64 de la Constitution, qui se trouve disqualifiée en simple mesure règlementaire, en simple mesure d’administration de la justice pour le service public de la justice !
Foin donc des théories doctrinales et jurisprudentielles sur l’accès à la justice, sur le recours effectif contre les décisions judiciaires, sur les « décisions insusceptibles de recours », sur « le droit d’agir en justice contre les décisions faisant grief », souligné par le Conseil Constitutionnel ( CC 10 mars 1988), sur « le droit des personnes intéressées d’exercer un recours effectif devant une juridiction conformément aux principes généraux du droit » souligné par le Conseil d’Etat ( CE 29 juillet 1998, Syndicat des avocats de France), sur « le nécessaire respect du droit de chacun d’accéder au juge chargé de statuer sur sa prétention », souligné par la Cour de Cassation ( Civ. 1, 16 mars 1999, Bull. n. 92). !
Pour la Cour d’appel de Versailles, le jugement du 21 janvier 1982 rendu par le TGI Thionville en audience solennelle d’installation ne relève que de la mesure infra-règlementaire, voire même du « cadre des pouvoirs de police du président » !
Comment dans ces conditions Jacques BIDALOU aurait-il pu se satisfaire d’un tel arrêt qui , au-delà du temps qu’il a fallu pour qu’il soit rendu —- 26 années, c’est quasiment une vie professionnelle de magistrat !—- caractérise si ouvertement l’inaptitude à remplir la mission de justice !
C’est dans ces conditions que l’Agent Judiciaire de l’Etat a été attrait par Jacques BIDALOU devant le TGI Paris pour rendre compte de sa responsabilité civile engagée sur le fondement de l’article L 141-1 du Code de l’Organisation Judiciaire, à la fois pour le dépassement du délai raisonnable et pour la faute lourde générée par le refus du droit d’exercer un recours effectif contre le jugement du 21 janvier 1982 qui au mépris des droits statutaires de Jacques BIDALOU, juge titulaire, a prononcé l’installation d’un « usurpateur », le sieur Bernard WEIER.
L’époque avait quelque peu changé mais les temps sont demeurés troubles… surtout que dans l’intervalle, Jacques BIDALOU, demeuré privé du privilège de l’inamovibilité dans les circonstances de sa réintégration dans les cadres de la magistrature par un décret du 26 août 1981 ( de facture ouvertement criminelle) a subi dès le retour au pouvoir de la majorité parlementaire qui avait couvert sa révocation de 1981(… nommé ministre de la justice le 20 mars 1986, M. CHALANDON a prononcé la suspension de Jacques BIDALOU dès le 22 mai 1986 !), un règlement de comptes imparable… C’est en effet par l’exercice de son pouvoir disciplinaire propre que le ministre de la justice Albin CHALANDON a pu renvoyer le 19 mai 1987 Jacques BIDALOU à une mise d’office à la retraite ( avec radiation des cadres par un décret du 24 juillet 1987 … dont il reste toujours à vérifier qu’il a été signé par le président de la République François MITTERRAND, cf. Bruno LATOUR, « La fabrique du droit », chapitre : un décret controversé », ed. La Découverte, 2002).
Le TGI Paris a rendu son jugement le 28 janvier 2015… après quatre ordonnances du juge de la mise en état qui se sont avérées vaines pour permettre la production aux débats sous leur forme authentique des décrets du 17 janvier 1978, 10 mars 1981, 26 août 1981 et 24 juillet 1987 qui ont réglé la vie et la mort professionnelle de Jacques BIDALOU.
Il était demandé réparation à hauteur de 10 000 euros par année passée pour le dépassement du délai raisonnable… le Tribunal a retenu une somme de 75 000 euros ( « … attendu que la durée abusivement longue de la procédure qui a été imposée à M. BIDALOU lui a occasioné des désagréments qui vont au-delà des préoccupations habituelles causées par un procès, en ce qu’était en jeu sa vie professionnelle »…)
75 000 euros donc pour une vie professionnelle délibérément saccagée ! … Ce n’est pas cher évaluer en tout cas la vie professionnelle d’un magistrat !
Il était également demandé réparation pour « faute lourde » à hauteur d’une somme de 500 000 euros… ce qui supposait à tout le moins que les juges fassent l’effort de comprendre la portée de cette « faute lourde » !
Mais le Tribunal a évacué toute réflexion sur ce point, puisqu’il s’en est tenu à relever que la décision d’irrecevabilité prise par la Cour d’appel de Versailles traduisait bien l’exercice d’un recours effectif contre le jugement intimé du 21 janvier 1982 !
Ainsi priver un justiciable de son droit effectif à un recours juridictionnel en le déclarant irrecevable, c’est régler définitivement la question … circulez, il n’y a rien à voir !
Aussi bien l’Agent Judiciaire de l’Etat que Jacques BIDALOU ont formé appel du jugement ainsi rendu le 28 janvier 2015 par le TGI Paris.
Il est à noter que sans attendre l’échange des conclusions entre parties, le Ministère Public ( M. Antoine STEFF , avec l’étrange collaboration de « Augustin NANCY , élève-avocat » !!!) a présenté ses propres conclusions signifiées le 14 octobre 2016 pour contester la somme allouée de 75 000 euros et proposer une réparation à la seule hauteur de 10 000 euros , avec cette appréciation : « Le délai excessif de la procédure n’a pas causé à M. BIDALOU d’autre préjudice que le préjudice moral de la méconnaissance de son droit à un délai de jugement raisonnable » ( sic).
Et pour ce qui est de la « faute lourde » résultant de la privation du droit à un recours juridictionnel effectif , l’attelage hybride du Ministère Public considérera que « le fait même que la décision du 7 février 2008 ait été rendue, quoique tardivement, et quoiqu’il s’agisse d’une décision d’irrecevabilité, prouve précisément que M. BIDALOU a pu exercer son droit à un recours juridictionnel effectif » ( sic).
… Quelle voie de recours ? Celle d’un appel déclaré irrecevable !
Voilà donc ce qu’il doit advenir du juge qui voulait opposer ses droits statutaires de juge titulaire à un usurpateur nommé sur le prétendu siège vacant du tribunal d’instance de Hayange : Une défense totale d’être entendu dans sa cause !
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Antoine STEFF se gardera bien de répliquer à mon courrier en réponse du 25 octobre 2016 ( et Mme le Procureur général CHAMPRENAULT laissera sans suite mon courrier adressé le 11 novembre 2016, comme mon courrier adressé le 31 janvier 2017)
La clôture de la mise en état était intempestivement fixée au 7 mars 2017, mon avocat allait soulever le 2 janvier 2017 un incident de communication de pièces… dans le prolongement des vains efforts diligentés devant le juge du premier degré.
Par son ordonnance du 18 avril 2017, Mme Marie-Sophie RICHARD, magistrat chargée de la mise en état, rejetait la demande … en arguant que les pièces demandées ( sur ma situation statutaire) étaient « sans lien avec le présent litige » et que j’en avais au demeurant déjà la possession !
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BIDALOU ne pouvait que protester vigoureusement en alertant les Chefs de Cour de la Cour d’appel de Paris par un courrier du 26 avril 2017 :