Paris le 18 septembre 2018
Jacques BIDALOU
Magistrat honoraire
à
Mme la Ministre de la Justice
Garde des Sceaux
Défenseur d’Alexandre BENALLA
Militante de LGBT
OBJET : Requête portant contestation relative au bénéfice de l’amnistie.
Les lois d’amnistie sont des lois d’ordre public, applicables si besoin d’office. Elles ont pour effet de supprimer rétroactivement le caractère délictueux des faits auxquels elles se rapportent. Elles s’appliquent alors qu’aucune peine n’a encore été prononcée ou après une condamnation définitive. Celle-ci est alors effacée et aucune information ne figure au casier judiciaire des bénéficiaires de la mesure.
Les lois d’amnistie n’excluent pas le champ disciplinaire.
Lorsqu’au moment où la loi est promulguée , les faits amnistiés n’ont pas encore provoqué de sanction, la procédure disciplinaire en cours et les éventuelles mesures conservatoires doivent être abandonnées. Si les faits amnistiés ont déjà provoqué une sanction, mais que celle-ci n’est pas encore appliquée, on doit procéder immédiatement à l’effacement automatique de la sanction. Si les faits amnistiés ont déjà provoqué une sanction et que celle-ci a été appliquée, il convient de procéder immédiatement à l’effacement automatique de la sanction.
Depuis 2007 les lois d’amnistie ont disparu de l’œuvre législative, mais le principe en demeure dans le Code pénal, article 133-9 : «L’amnistie efface les condamnations prononcées. Elle entraîne , sans qu’elle puisse donner lieu à restitution, la remise de toutes les peines. Elle rétablit l’auteur ou le complice de l’infraction dans le bénéfice du sursis qui aurait pu lui être accordé lors d’une condamnation antérieure ».
L’amnistie est d’ordre public et l’individu qui en est bénéficiaire ne peut y renoncer. Si les poursuites ont commencé, il ne peut exiger qu’elles aillent à leurs termes afin que son innocence soit établie.
ET SUR CE :
En introduction, je vais d’abord rappeler qu’en 1979 j’ai fait l’objet par le Tribunal de Police de Bar le Duc d’une condamnation pour contravention dans le transport ferroviaire, que cette condamnation a été confirmée par la Cour d’appel de Nancy, et que j’ai alors régulièrement formé un pourvoi en cassation pour le renvoi au néant d’une telle condamnation pénale visiblement infligée par une justice ouvertement désaxée, incapable de se hisser à la compréhension du droit applicable.
Mais la Cour de Cassation m’opposera un refus de se prononcer sur une décision qui se trouvait amnistiée de plein droit par la loi du 4 août 1981 portant amnistie ! … C’est ainsi que je n’ai pas pu faire valoir mon innocence !
Le 8 février 1981, j’ai en tout cas été révoqué de mes fonctions de juge d’instance de Hayange par une décision du Conseil Supérieur de la Magistrature et de la Forfaiture réunies.
Cette décision a manifestement été prononcée de façon arbitraire, sur le fondement de faux flagrants en écritures publiques , de sorte que le nouveau ministre de la justice Robert BADINTER me déclarera amnistié et bénéficiaire d’une réintégration bien avant que la loi du 4 août 1981 portant amnistie ne soit promulguée !
Au demeurant, cette décision calamiteuse du 8 février 1981 n’était nullement assortie de l’exécution provisoire et ne pouvait donc recevoir exécution.
En exécution pourtant de cette décision, le Ministre de la Justice prendra néanmoins un décret de radiation des cadres en date du 10 mars 1981, décret publié au Journal Officiel du 11 mars 1981, mais qui ne me sera jamais notifié et donc jamais rendu opposable, , et qui indépendamment de sa nullité de droit par application de la loi d’amnistie du 4 août 1981 déterminant son effacement immédiat , se trouvera naturellement frappé de caducité dès lors qu’un décret postérieur du 26 août 1981 viendra prononcer ma réintégration dans les cadres de la magistrature.
Mais la vérité c’est que je serai finalement privé du bénéfice de la loi d’amnistie du 4 août 1981— et des effets d’ »annulation de toutes les conséquences », prévus par la circulaire d’application aux agents publics prise le 19 août 1981 par le Premier Ministre et publiée au JO du 30 août 1981.
Le décret du 26 août 1981 qui a prononcé ma réintégration dans les cadres de la magistrature et m’a nommé substitut du procureur de la République près le TGI Pantoise a en effet été pris sans référence à la loi d’amnistie du 4 août 1981, qui n’est d’ailleurs même pas visée dans ce décret.
Et lorsque le Conseil d’Etat, par son arrêt n. 33352 du 5 mai 1982, statuera sur mon pourvoi en cassation formé le 27 avril 1981 contre la décision de révocation du 8 février 1981, il statuera sans viser cette loi d’amnistie du 4 août 1981 à nouveau ni mentionnée ni appliquée.
Et pourtant, depuis 1982, qu’il s’agisse des medias, des autorités judiciaires, des instances de la Chancellerie ou encore du Ministère des Finances, la fable — qui vaut « fake news » !—- de l’amnistie- qui- aurait- réglé- ma- réintégration continue d’être reprise, répétée, reconduite… et encore en 2018 comme en témoigne le livre anniversaire de 50 ans d’existence, du Syndicat de la Magistrature, « Juger sans entraves » ! ( page 47)
Le pire, c’est que j’ai beau dénoncer cette « fake new », qui définit une violation de la loi d’amnistie, et au-delà une mise à bas de la cohérence juridique, et au-delà encore la destruction du principe constitutionnel de l’inamovibilité des juges du siège, tout le monde s’en fout… à commencer par l’actuel Directeur des Services Judiciaires, M. Peimane GUALEH- MARZBAN qui aurait pu apparaître comme un magistrat respectable, fidèle aux idéaux de la magistrature indépendante conscient de ses devoirs professionnels, mais qui par ses silences valant désertion et trahison, démontre essentiellement son alignement lamentable sur les pires de ses prédécesseurs !
… Etre seul à résister ce n’est pas forcément avoir tort, comme aurait dit aux temps de l’occupation du territoire français par les troupes nazies le magistrat Paul DIDIER…
EN SUITE DE QUOI :
Etre amnistié sans être bénéficiaire de l’amnistie, c’est certes une situation inconfortable, mais quand vous savez que de par la loi vous restez amnistié de droit !
Il y a pire, c’est de se voir refuser l’amnistie par une ministre de la justice affairée par son nombril mais certainement pas par la dignité de ses fonctions
Il doit être ici rappelé ici que le 30 août 2014, le requérant a demandé à Mme TAUBIRA, Ministre de la Justice, la protection statutaire prévu par l’article 11 du Statut de la Magistrature pour combattre la diffamation par voie de presse qui à l’occasion des obsèques de son ancien avocat Jacques VERGES l’avait désigné comme « ancien juge chassé de la magistrature ».
Naturellement la Ministre s’est maintenue dans un silence aussi implacable qu’abject et j’ai alors saisi le Tribunal administratif de Paris .
Obligée alors de répondre audit Tribunal administratif, Mme TAUBIRA a produit des conclusions du 5 novembre 2014 dans lesquelles , sous prétexte du « rappel des faits », elle s’enfoncera dans d’odieuses affirmations monstrueusement fausses.
Elle écrira en effet :
« Par suite de l’application des dispositions de la loi d’amnistie du 4 août 1981, un décret du 26 août 1981 a prononcé sa réintégration et l’a nommé au poste de substitut du procureur de la République à Pontoise » ( sic) !
Monsieur BIDALOU fut, par la suite, radié des cadres par le décret du 24 juillet 1987 ,à la suite d’une décision du garde des sceaux du 19 juin 1987 prononçant contre lui la sanction de mise à la retraite d’office après avis du Conseil Supérieur de la Magistrature émis le 15 mai 1987, décision ne bénéficiant pas de la loi d’amnistie, car les faits reprochés constituaient des « manquements à l’honneur , à la probité ou aux bonnes mœurs » ( sic) !
Oh la menteuse, elle est filandreuse !
Aussi sûr que Jacques BIDALOU n’a pâs bénéficié de l’amnistie du 4 août 1981— en dépit des proclamations du ministre de la justice BADINTER , le 29 juillet 1981, devant l’Assemblée Nationale—- il est certain que nul n’a pu loyalement déclaré que la sanction disciplinaire du 19 juin 1987 constituait des « manquements à l’honneur, à la probité ou aux bonnes mœurs »—- et que serait ainsi justifiée mon exclusion du bénéfice de l’amnistie prévue par la loi n. 88-828 du 20 juillet 1988 et le refus de m’accorder la protection juridictionnelle demandée !
Ce gros mensonges délibéré de madame la ministre TAUBIRA est d’autant plus scandaleux que l’avis du 15 mai 1987 émis par la Commission de Discipline des magistrats du Parquet, a précisément rapporté que « M. BIDALOU a développé pour sa défense une conception personnelle des missions du ministère public, des attributions et pouvoirs respectifs des substituts et des procureurs de la République, ainsi que des principes d’une stratégie faisant du conflit le moyen de promouvoir certaines idées » et cette Commission a alors souligné « Considérant que la Commission ne saurait retenir ces idées et des principes comme pouvant justifier les faits relevés à la charge de M. BIDALOU, Qu’elle remarque cependant qu’aucun de ceux-ci ne révèle chez leur auteur la moindre trace de malhonnêteté » .
Et vlan, paf sur TAUBIRA !
C’est en tout cas assez dire que lorsque Mme TAUBIRA déclare qie les faits reprochés constitueraient des manquements à l’honneur, à la probité ou aux bonnes mœurs, elle fait état d’une réserve générale retenue par la jurisprudence pour refuser le bénéfice d’une loi d’amnistie, mais en se plaçant hors toute référence à la sanction disciplinaire du 19 juin 1987 !
ET SUR CE :
Il s’agit donc ici de se référer aux dispositions de l’article 17 de la loi du 20 juillet 1988 portant amnistie aux termes desquelles il est expréssément disposé :
« Les contestations relatives au bénéfice de l’amnistie des sanctions disciplinaires ou professionnelles définitives sont portées devant l’autorité ou la juridiction qui a rendu la décision. L’intéressé peut saisir cette autorité en vue de faire constater que le bénéfice de l’amnistie lui est effectivement acquis. »
Aux termes de la présente requête, je demande donc à Mme Nicole BELLOUBET, Garde des Sceaux en exercice et militante LGBT, de se déclarer saisie pour constater ou faire constater que le bénéfice de l’amnistie relative à la sanction disciplinaire du 19 juin 1987 qui m’a été infligée par le ministre de la justice Albin CHALANDON— quasi centenaire aujourd’hui et toujours mis en examnen dans l’affaire Visionex —- m’est effectivement acquis, et d’ordonner en conséquence, en application de l’article 23 de la loi du 20 juillet 1988, ma réintégration dans mes fonctions et dans mes divers droits à pension.
Je demande aussi qu’il me soit donné acte qu’en application de l’article 24 de la loi n. 81-736 du 4 août 1981 et de l’article 25 de la loi n. 88-828 du 20 juillet 1988, « l’amnistie ne peut en aucun cas mettre obstacle ni à la réhabilitation ni à l’action en révision devant toute juridiction compétente tendant à faire établir l’innocence du condamné ».
Copie de cette requête est adressée à M. le Directeur de Cabinet de Mme le Garde des Sceaux ainsi qu’à M. le Directeur des Services Judiciaires.
J’en adresse également copie aux organisations syndicales de la Magistrature qui ne sont ni avachies ni avaries, ainsi qu’à M. Bertrand LOUVEL, Premier Président de la Cour de Cassation, révisionniste fielleux des décisions et avis du CSM.
J’en adresse enfin copie à M. le Ministre Albin CHALANDON, qui gardera ainsi encore une chance d’éviter de finir en enfer.
Pièces jointes :
-
ma requête à Mme TAUBIRA du 30 août 2013
-
les conclusions de Mme TAUBIRA du 5 novembre 2014 emportant contestation du bénéfice de l’amnistie.
Par ces Motifs
Plaise à Mme le Garde des Sceaux
Assumer légalement son obligation légale de répondre légalement à cette voie de recours légale.
Dire pour droit que la sanction disciplinaire du 19 juin 1987 est effacée par la loi d’amnistie n. 88-828 du 20 juillet 1988.
Porter cette décision à l’attention de Jacques BIDALOU dans les plus urgents délais.